"Fenêtre avec vue" est publié dans le journal suisse La couleur des jours, n°18, printemps 2016. http://www.lacouleurdesjours.ch/sommaires.php?ID=36
Ce travail photographique met en parallèle la commune de Saint-Vulbas, en France (Ain) et la ville de Slavoutytch, en Ukraine.
La construction des centrales nucléaires par l’ex-URSS dans les années 1970 s’est souvent accompagnée de la création de villes...
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"Fenêtre avec vue" est publié dans le journal suisse La couleur des jours, n°18, printemps 2016.
http://www.lacouleurdesjours.ch/sommaires.php?ID=36
Ce travail photographique met en parallèle la commune de Saint-Vulbas, en France (Ain) et la ville de Slavoutytch, en Ukraine.
La construction des centrales nucléaires par l’ex-URSS dans les années 1970 s’est souvent accompagnée de la création de villes nouvelles. En 1986, l’accident nucléaire de Tchernobyl a rayé de la carte Prypiat, la plus célèbre d’entre elles. Face à l’ampleur du drame, à la nécessité de reloger la population et à la préservation de son image, l’ex-URSS avait alors réagi en construisant ad hoc une autre ville nouvelle de secours : Slavoutytch. Elle fut érigée à la périphérie immédiate de la zone officiellement délimitée comme contaminée. Dans les faits, bien entendu, elle est trop proche. Saint-Vulbas est un village de 1000 habitants qui accueille la centrale nucléaire du Bugey, le long du Rhône.
À Slavoutytch, la population vit l’après catastrophe. Au Bugey, la population vit comme si la centrale n’était pas là alors que les riverains l’ont dans l’encadrement de leurs fenêtres. C’est de ce décalage que mon propos désir rendre compte. Pour chacun, leur fenêtre ouvre sur le nucléaire, mais pas avec le même vécu.
Un autre élément est commun à ces habitants. Pour les habitants de Saint-Vulbas, la centrale est source de rente financière. Elle permet à la commune d'offrir, grâce à l'argent versé par la centrale, des services publics de grande qualité. De plus, de nombreux emplois sont créés, directement et indirectement, pour la communauté de communes.
À Slavoutytch, les habitants bénéficient d'un meilleur cadre de vie que dans bien d'autres villes ukrainiennes. Là aussi, des emplois sont créés, mais rendus nécessaires par la catastrophe.
Je suis allé en reportage à Slavoutytch pendant l'hiver 2014-2015. Rentré chez moi, je me suis questionné sur la centrale la plus proche de mon domicile. Elle se trouve à cent kilomètres. C'est trop loin pour la voir de ma fenêtre. C'est trop près pour ne pas me sentir concerné Je suis donc allé à Saint-Vulbas, pendant l'automne- hiver 2015-2106. J'ai rencontré les riverains de la centrale du Bugey et photographier la vue depuis leurs fenêtres. Mon intention est de montrer le paradoxe entre le fait de ne voir concrètement "que ça", dans sa fenêtre, et de ne "plus le voir", l'esprit l'ayant occulté. De montrer que le fait nucléaire est parfaitement intégré à nos vies, à notre territoire, jusqu'à disparaître de notre perception. Et dans le même temps, de montrer la formidable résilience face à l'accident de Tchernobyl.
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